Le cannabis médical est un sujet de moins en moins tabou et nombreux sont désormais les pays qui le considèrent sérieusement ou l’ont déjà légalisé. Le débat avance, et de nouvelles idées sont régulièrement soumises. Attardons-nous aujourd’hui sur le Royaume-Uni et leur concept de Cancard. Nous avions évoqué il y a peu l’ouverture imminente des premiers dispensaires de cannabis médical en Ecosse, et nos voisins d’outre-Manche ne manquent visiblement toujours pas d’idées.

La Cancard : par qui, et comment ?

La Cancard a été inventée par Carly Barton, et mise en place le 1er novembre 2020. Carly est la première patiente du Royaume-Uni à s’être vu proposer une prescription pour du cannabis médical en 2018 après le changement de loi. Cela afin de l’aider à traiter sa fibromyalgie et neuropathie post-traumatique.

Ce projet a par ailleurs été réalisé avec l’aide d’officiers de police de haut rang, de professionnels de la santé, ainsi que de l’écriture et de l’application des lois. Il s’agit là d’une collaboration sans précédent qui mérite d’être saluée !

Faire une demande pour obtenir la Cancard est relativement simple et nécessite un investissement de 19,99 £ (23 €). Il vous est simplement demandé les informations personnelles habituelles, un rapport médical de votre médecin traitant… et bien entendu souffrir d’une des maladies pouvant être traitée avec du cannabis médical (épilepsie, nausées/vomissements liés à une chimiothérapie, sclérose en plaques).

Carly Barton, à l’origine du projet Cancard

Pourquoi, pour qui ?

Carly Barton déclare que « Malgré le fait que les médicaments à base de cannabis soient devenus légaux en 2018, les patients qui ne peuvent pas se permettre une prescription coûteuse se retrouvent sans solution. Cancard donne la possibilité à la police d’exercer son pouvoir discrétionnaire en comprenant que le patient en possession de cannabis est en fait en train de soigner sa maladie. »

L’idée est donc de permettre aux personnes n’ayant pas les ressources financières pour se soigner via le cannabis médical légal souvent coûteux, d’avoir une certaine tranquillité d’esprit s’ils sont arrêtés en possession de cannabis acquis via l’économie « parallèle ».

Notons bien toutefois que cela ne change en rien le statut du cannabis, toujours considéré illégal au Royaume-Uni (hormis dans un cadre médical réglementé depuis 2018 donc). Il s’agit là d’une carte prouvant que son détenteur est atteint d’une maladie éligible à une prescription de cannabis médical. Ainsi, en cas de contrôle inopinée, cette carte pourra être présentée aux forces de l’ordre.

Le site de Cancard explique que « pour les forces de police, il existe une frustration quant à la capacité d’identifier les patients légitimes afin qu’ils puissent utiliser leur pouvoir discrétionnaire. » et concernant la possession d’une Candard, « qu’il s’agit d’une circonstance atténuante pour le CPS, ce qui signifie qu’une simple affaire de possession a peu de chances d’aboutir au tribunal. »

Source : NORML

Après 5 mois, quel bilan ?

  • 20 000 personnes détiennent aujourd’hui une Cancard.
  • 96% des personnes contrôlées par la police et en possession d’une Cancard, ont pu s’en sortir sans arrestation, selon The Times.
  •  3,5 millions de Britanniques ont une pathologie les rendant éligibles à l’obtention d’une Cancard.
  • Il est estimé que plus d’un million de personnes au Royaume-Uni s’approvisionnent illégalement en cannabis pour auto-médication.
  • Moins de 100 personnes ont pour le moment reçu une prescription de cannabis médical.

Ces chiffres témoignent assez clairement de restrictions dans l’attribution de prescriptions de cannabis, ainsi que d’une lenteur dans la mise en place de ces nouvelles thérapies. Cancard ne prétend pas résoudre ce problème, mais offre une certaine tranquillité d’esprit aux personnes contraintes de se tourner vers le marché noir. On souhaiterait bien entendu que ce type d’initiatives n’ait pas besoin d’exister… mais puisque les faits montrent qu’il est encore très compliqué de se faire prescrire du cannabis, saluons cette initiative ! En espérant d’une part qu’elle mettra en lumière les failles dans l’implémentation du système actuel, et inspirera par ailleurs d’autres pays.